Entretien avec 3 Minutes Sur Mer

Le Transistor a rencontré 3 Minutes Sur Mer un soir, presque par hasard, sous un porche. Et l’intensité que ces deux musiciens dégageaient avec presque rien nous a émus. A l’occasion de la sortie de leur album live Des Espoirs de Singes, on a décidé de vous les présenter, pour partager de cette émotion avec vous. C’est beau ce qu’on dit ? c’est normal, c’est 3 Minutes Sur Mer qui nous a inspirés.

3 Minutes Sur Mer

Le nom de cet album ne veut rien dire… tout comme le nom du groupe d’ailleurs. « Le nom de l’album vient d’un arbre, car Guilhem était jardinier avant. L’idée de départ, c’est l’araucaria, cet arbre sans feuilles et plein d’épines qu’on appelle le désespoir du singe parce qu’il peut pas y grimper. C’est comme 3 Minutes sur Mer, à chaque fois on trouve les noms par associations de mots et sur les connotations que ça peut avoir. L’important c’est de voir les images qui arrivent sans qu’on donne d’explication. »

Entretien avec 3 Minutes sur Mer

Entretien avec 3 Minutes sur Mer

Des Espoirs de Singes a été enregistré lors d’une résidence à l’Espace Jemmapes. « Cet album, c’est une chance. C’est Chris qui a enregistré la première session sans nous prévenir et nous a envoyé le mix. C’était quelque chose de très spontané : d’un coup les prises étaient là, avec quelqu’un qui arrive à mettre une plus-value sur ce qu’on fait artistiquement. Donc on allait pas le laisser dans un tiroir prendre la poussière. » Cet album arrive pour la première fois à retranscrire ce dont ils sont capable. « On avait besoin de ce disque là parce que ça arrive souvent que des gens viennent nous voir en concert, parce qu’ils ont été trainés par un ami, et qui en fait trouvent ça bien ce qu’on fait alors qu’ils supportaient pas ce qu’ils entendaient sur MySpace… »

En effet, il y avait un énorme fossé entre leur live et leurs enregistrements en studio. « Quand on est en live, on joue ensemble, même si y’a le boucleur qui est entre nous deux. On est en prise directe devant des gens, la façon de chanter est pas du tout la même, on joue avec l’ensemble du son. Quand t’es sur scène, tu défends une chanson, ce qu’on sait pas encore faire en studio. » Parce qu’ils n’en avaient pas encore réellement les moyens. « C’est pas du studio qu’on a fait jusqu’à présent, c’est des maquettes que tu diffuses en souvenir. On a pas encore eu accès à cette étape là, on sait s’enregistrer mais faire un disque c’est un autre boulot, qu’on va apprendre. »

Il y avait aussi cette intention de ne rien fixer, de laisser la place aux morceaux pour évoluer. « On a jamais attendu d’avoir le produit net, la photo nette, l’enregistrement, le cinq titres précis. C’est pas grave, l’important c’était qu’on soit en travail constant, c’est humain, c’est vivant, c’est ce que j’aime avec la notion d’artisanat ou d’ouvrier, c’est les défauts qui font une personnalité aussi, c’est pas forcément d’être impeccable… c’est organique. »
Et maintenant 3 Minutes Sur Mer est prêt à passer le cap de l’album. « L’envie c’est que ce disque puisse parler pour nous pendant qu’on sera absents, parce qu’il va falloir partir en studio. Donc il fallait ce disque là pour pouvoir présenter le polaroid de 3 Minutes sur Mer en octobre 2011, l’énergie scénique c’est ça. Nous pendant ce temps là on va retourner travailler, écrire, et livrer un album studio pour fin 2012 si on meurt pas en route. »

Pour l’anecdote, Samuel et Guilhem se sont d’abord rencontrés sur petite annonce. « On est pas de Paris et comme tout musicien qui monte à la capitale, y’a un moment où tu fais le tour des salles de répétition, des annonces sur les magazines musique, comme la fameuse page à la fin de rock’n’folk : “groupe aimant écouter Radiohead, AC/DC et Aerosmith – comme tout le monde – cherche batteur, sachant taper très très fort et si possible ayant un local”. En arrivant à 23 ans, j’avais une ambition démesurée à l’époque, donc j’ai pris l’annonce la plus prétentieuse possible. » C’est comme ça que Guilhem est tombé sur un groupe dans lequel Samuel était bassiste. « Et vu qu’on voulait révolutionner le rock’n’roll mais qu’on en avait pas les épaules, on a pas continué dans ce groupe-là ; mais ça a été l’occasion d’une rencontre, de devenir potes en fait. Et c’est à partir de cette amitié là qu’on a monté autre chose, qui est devenu 3 Minutes sur Mer. »

Samuel et Guilhem ont créé 3 Minutes sur Mer malgré des influences contradictoires. « Sam venait d’une musique beaucoup plus rock’n’roll, plus agressive et plus pêchue que moi qui étais très pop fm : je peux te parler de U2 comme lui va te parler de Korn. Et l’idée c’était d’écrire quelque chose qui nous ressemblait à tous les deux, de voir ce qu’on avait en commun en tant que personne. » L’association de leurs deux personnalités donne un son plus riche. « On s’est retrouvé à mélanger cette envie de rock’n’roll avec cette langue qu’est le français, une chanson minimaliste avec des guitares qui crient très fort comme ce qu’on écoutait quand on était mômes. A mélanger notre patrimoine et notre culture individuelle. »

Pour autant, Samuel et Guilhem aiment tous les deux les musiques marquées d’intensité. « Ce qui nous relie à la base, c’est qu’on aime bien les choses qui nous mettent les poils. On a cette vision de la musique, c’est comme le principe des arts martiaux, t’as un truc négatif et faut essayer d’en faire un truc positif, donc on a cette approche – j’aime pas ce mot là mais – thérapeutique : les choses mauvaises, les douleurs, on essaie d’en faire des chansons pour leur redonner un côté lumineux. » Avec cette envie de faire réfléchir. « On aime tous les deux les disques qui font du bien, qui font évoluer, qui font grandir. C’est un truc qui nous parle aussi, et modestement c’est ce qu’on essaie de faire. »

Aux débuts de 3 Minutes sur Mer, Guilhem et Samuel se faisaient appeler Mohammed et Andy. « C’était la première année, celle où tu cherches en fait qui tu es, tu te mets dans des personnages avec des pseudonymes. On avait beaucoup de mal à aller sur scène, moi c’était le premier groupe avec lequel je jouais, et y’a un truc qui était pas très assumé, donc on a trouvé des costumes un peu bizarre et des noms abracadabrants pour se cacher. » Au bout de six à huit mois, ils ont arrêté ces jeux de rôle. « C’était plus de la jeunesse qu’autre chose ces pseudonymes. C’était drôle, ça nous permettait de dire des choses sérieuses tout en faisant des blagues… parce qu’on s’excusait peut-être un peu d’être là, j’en sais rien. »

Une fois les masques tombés, ils ont pu aussi aborder des thèmes plus personnels. « Moi n’ayant jamais écrit de chanson avant, je m’étais attelé à écrire des fictions, comme beaucoup de chansons réalistes, avec le personnage de la rue, le voisin… et j’étais nul parce que je faisais semblant. Et le moment où on a réussi à avoir des émotions communes et que ça a fonctionné sur scène c’est que j’ai juste parlé de moi. » Et c’est cette honnêteté qui fait la différence. « L’idée c’est de pas être dans le défouloir, mais d’utiliser une période de vie, pour voir ce que j’en avais compris ou pas. Et plus t’es honnête et clair avec ce que tu es, plus les gens vont se reconnaître eux-mêmes ou des proches, voir dans tes textes les choses qui les bouffent… »

Réclame

3 Minutes sur Mer fêteront la sortie de Des Espoirs de Singes le 4 mars au Divan du Monde.


Remerciements : Loïc (il se reconnaîtra)

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