Entretien avec Local Natives

Il y a trois ans, Gorilla Manor avait bouleversé d’intensité. Après une longue tournée, et un passage d’introspection nécessaire, les Local Natives reviennent avec Hummingbird, un album plus profond. Le premier, trop accessible, avait établi les présentations, le suivant, moins superficiel, permet d’apprendre à réellement les connaître. Le Transistor s’est posé avec Kelcey Ayer et Ryan Hahn à la veille de leur Point Ephemere.

Local Natives

Auparavant quintette, le groupe a dû faire face au départ de leur bassiste, Andy Hamm. « Oui, c’est un sujet sensible. Mais nos chemins se sont séparés afin d’être plus heureux. »

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Après deux ans sur les routes, les Local Natives pensaient pouvoir se poser mais… « On a commencé à recevoir des propositions de tournées : on est partis pour la première fois au Mexique, on a tourné avec Arcade Fire, on a joué avec un orchestre, que des choses géniales ! C’était difficile de refuser. Et en plus, on a eu des évènements qui ont survenus dans nos vies, ce qui nous a forcés à repousser le moment de l’écriture. » C’est cette vie toujours en mouvement qui a inspiré le titre de l’album. « Hummingbird ça vient des paroles de ‘Columbia’. Le colibri vit un peu entre deux mondes, il bouge sans arrêt, sinon il meurt. Et ça correspondait un peu à l’état d’esprit du groupe : à force de vivre à un rythme de fou, on ressent ce besoin de ralentir pour réfléchir. Et cet oiseau peut représenter toutes les chansons de l’album, toutes ses facettes. »

Pour autant, les Local Natives ont choisi de prendre leur temps pour soigner l’écriture. « On voulait pas précipiter les choses. On voulait être sûr d’en être content, et ça nous a pris du temps pour y arriver. Parce qu’on travaille de manière collaborative, tout le monde écrit. Et je pense qu’on a cherché à creuser un peu plus. » Le groupe a tenu à se poser des défis pour ne pas tomber dans la répétition. « On a essayé de faire quelque chose de nouveau, d’être plus honnêtes et directs dans les paroles. C’est pour ça que les textes paraissent parfois un peu plus durs. On a envie que les gens se posent et passent du temps avec cet album, pour connecter au niveau émotionnel. »

Tout a commencé par la rénovation d’un nouveau studio. « On a trouvé ce bengalow du côté de Silverlake, qui n’avait pas été utilisé depuis quelques années, donc y’avait des choses à rénover, notamment sur l’insonorisation afin de pouvoir enregistrer nos démos. On a composé la plupart des éléments à cet endroit.» Un peu comme leur Gorilla Manor qui avait donné son nom au premier album. « C’était une longue période de pré-production, où on a écrit toutes les parties et commencé à jouer avec pour arriver à quinze ou vingt idées solides. On y était de juin jusqu’à notre départ pour Montréal et New York pour les réels enregistrements avec Aaron Dessner en début d’année 2012. »

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Leur producteur, ils l’ont rencontré pendant la tournée. « On discutait un soir, et c’est venu sur le tapis de manière décontractée, je pense pas qu’on l’ait vraiment pris au sérieux au début. Puis un mois plus tard, on cherchait quelqu’un pour nous aider, donc on lui a envoyé les démos pour voir si ça lui plaisait. On avait sept ébauches de morceaux, un avant-goût de notre travail. Il était en vacances avec sa femme à ce moment-là, il venait de finir une grosse tournée, mais il a quand même pris le temps d’écouter et de nous envoyer des notes. » Aaron Dessner, de The National, a joué un rôle de grand frère sur cet album. « C’était bien d’avoir une cinquième personne, pour brainstormer. Son rôle c’était surtout de nous apporter son expérience, parce qu’il est sur la scène musicale depuis bien plus longtemps que nous, et c’est un compositeur que l’on respecte, donc il nous a aidé à donner une forme à nos idées. Je pense qu’il a fait ressortir un bon aspect du groupe. On est du genre à s’engueuler, à se prendre la tête sur des détails, et il était bon pour nous aider à lâcher prise. On a pu être moins mathématiques… »

Se retrouvant à quatre subitement, le groupe a développé de nouvelles méthodes de composition. « On était tellement à l’aise en tant que quintet, que ce soit en studio ou en live, que quand on a s’est retrouvés à quatre, on a composé comme si on était encore cinq. Donc pour pallier à ce manque, on se repose beaucoup plus sur des enregistrements. Ce qui nous ouvre la voie à beaucoup d’options dont on n’était pas conscients auparavant, simplement parce qu’on en avait pas besoin. » Leurs goûts musicaux aussi ont changé, même si ça se ressent pas forcément. « J’ai l’impression qu’on a pas mal mûri au cours de ces quelques années. Cet album, c’est celui qu’on aimerait écouter. On est allés au Parc National de Joshua Tree, pour jammer un peu, c’est comme ça que ‘Ceilings’ est née. »

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Le morceau le plus important reste ‘Columbia’ qui rend hommage à la mère Kelcey Ayer. « C’est un sujet triste, un décès, mais on célèbre quelqu’un. Dans un sens, cet album est cathartique. On a traversé beaucoup d’épreuves ces dernières années et le fait de les écrire nous a permis de résoudre beaucoup de choses lourdes émotionnellement. Cet album a été très difficile, c’était un réel défi pour nous. Donc on célèbre notre victoire tous les soirs. On est fiers de cet album. » Les Local Natives refusent de céder à la facilité. « Ce serait malhonnête de notre part si on écrivait un album joyeux : on veut que nos morceaux viennent du cœur. Et chaque chanson a une signification pour nous. On se sent bien maintenant quand on joue les nouveaux morceaux, même les plus tristes. C’est plus facile à jouer, parce qu’on pense ce qu’on joue, donc on peut les défendre. »

Réclame

Hummingbird, le deuxième album des Local Natives, paraîta le 28 janvier 2013.
Les Local Natives seront en concert le 5 mars au Trabendo. Et au Primavera Sound festival.
Local Natives – futurs Coldplay ?


Remerciements : Margaux (PIAS°

Catégorie : A la une, Entretiens
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2 réactions »

  • Route du Rock – Jour 1 | Le Transistor :

    […] Si, sur leur premier album Gorilla Manor, le groupe avait saisi par sa capacité à instaurer une ambiance presque incantatoire, les Local Natives ne prennent décidément aucun risque sur Hummingbird. Peut-être à cause du départ de leur bassiste, ou peut-être aussi que pour atteindre leur but des grands stades, ils préfèrent ne pas trop s’écarter de ce qui a marché par le passé. Et finalement, si le public ne réagit pas, il suffira d’une reprise des Talking Heads sur ‘Warning Signs‘ pour retrouver une atmosphère pop et légère. Lire l’interview des Local Natives […]

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