Entretien avec Piers Faccini

Piers Faccini avait conquis tout le monde avec Two Grains of Sand. Il revient avec un nouvel album, My Wilderness, plus épuré, plus simple, plus direct. Une beauté qui transporte vers des horizons lointains. Du coup, avec Piers Faccini, on a parlé voyages, influences et déserts. Et en Français s’il-vous-plaît.

Piers Faccini

My Wilderness : ce titre d’album n’annonce pas que Piers Faccini va nous dévoiler son côté sauvage. « Le wilderness, c’est comme un espace non habité, comme un désert ou une chaîne de montagnes, c’est un grand espace de nature – où on sent pas du tout la présence de l’homme.  Le wilderness que j’imagine, c’est plutôt genre entre des grands espaces de forêt, ou au milieu du Sahara ou du désert du Mexique. C’est ce genre d’espaces très très puissants, pas très hospitalier pour l’homme. Un endroit où la nature domine vraiment. »

My Wilderness : le possessif devant cet espace est là pour souligner une métaphore. « C’est l’idée que tu recrées en toi. C’est comme si tu te refaisais avec une idée de carte, et tu composais une sorte de géographie personnelle. » Piers Faccini explique qu’on a chacun cette carte géographique à l’intérieur de nous : « C’est ma culture, mon ADN, mes expériences émotionnelles, mes chagrins, mes amours, mes douleurs, mes voyages, mes rencontres, mes influences… tout ça fait que chacun de nous a une route personnelle. Une route unique même. C’est quelque chose qu’on peut jamais vraiment connaître comme on va pas connaître un désert, c’est beaucoup plus large. »

Le compositeur étant aussi peintre à ses heures perdues, il a lui-même réalisé la pochette. « J’ai voulu faire allusion à cette métaphore de géographie et de routes internes et extérieures. Cette sorte de miroir qu’on a entre la route littérale qui s’ouvre devant nous et une route intérieure qui nous guide à aller chercher. Et c’est pour ça aussi que j’ai utilisé des cartes géographiques et que j’ai fait des collages avec ça. J’essaye de faire un écho avec l’album. »

Pour éviter de se répéter, Piers Faccini a réalisé – composition, production et mixage – cet album tout seul. « J’ai déménagé de Londres pour aller vivre à la campagne, et l’idée d’aller vivre à la campagne, sous les montagnes, c’est aussi pour avoir de l’espace. Chez nous on est au bord d’un village avec les bois tout autour. Et dans les bois y’a une vieille bâtisse, et c’est là où avant ils mettaient des trucs pour les oliviers, pour les champs, pour travailler la terre. » Il a donc restauré ce vieux bâtiment au milieu des bois pour le transformer en studio. « C’est complètement à part, y’a personne à côté je peux faire tous les bruits que je veux, c’est retiré. Et je suis maître de mon temps parce que c’est pas un studio de location, j’ai pas d’ingé son à louer, je fais tout tout seul – jusqu’au moment où j’invite les musiciens à faire leur partie que je peux pas faire tout seul. Et donc c’est une démarche que je peux faire à mon rythme et c’est important. »

On pourrait croire que My Wilderness a été inspiré par les Cévennes, mais on y retrouve la patte de l’artiste : son métissage si particulier. « Il faut comprendre que ça fait plus de 20 ans que j’ai fait ces voyages-là et que je continue à les faire. Que ce soit même physiquement ou en écoutant la musique, ou en collaborant avec des amis… Donc tous ces sons et toutes ces couleurs différentes qu’on entend sur l’album, j’ai digéré en moi depuis très longtemps, c’est dans ma palette de couleurs depuis très longtemps. Je l’affine au fil des années. »
D’après Piers Faccini, les premières influences sont les plus ancrées. « J’écoute la musique malienne, ou la musique brésilienne, ou le blues du Mississippi ou le folk anglais… A 20 ans, j’ai emprunté cette route, je peux pas reculer. C’est ce qui fait que dans mon écriture on ressent le folk, le blues et la musique orientale, c’est parce que déjà cette route elle a été prise. Je marche sur cette route depuis très longtemps, c’est juste que j’affine au fil des années, en restant en mouvement. »

YouTube Preview Image

Cependant, tous ces arrangements aux sonorités orientales sont inconscients. « Moi je suis un peu métissé dans mes origines, et aussi quelque part apatride dans mes influences musicales, donc c’est normal que je fais aussi à ma façon une sorte de bouillon mélangé… mais ça reste ma musique. C’est juste que dans ma musique, y’a ces ingrédients-là – que j’ai pas choisis et qui sortent d’une façon ou d’une autre, mais c’est très inconscient en fait. » Avant tout, Piers Faccini tient à préciser qu’il est un songwriter. « Ce que ça veut dire c’est que tu prends un instrument et un carnet, et avec la base d’une mélodie et un rythme, tu poses les mots dessus et la chanson elle est faite. Même si tu l’arranges avec dix mille trucs ou pas, la chanson en dessous reste la même. » La démarche de songwriting ne peut jamais être faussée. dans le cas contraire, il sera facile de s’en apercevoir. « Si tu écoutes vraiment la chanson, et si tu l’écoutes piano-voix ou guitare-voix, et que ça roule pas, ça veut dire que la chanson, à la base, en terme de structure de chanson, en terme de songwriting, la chanson n’est pas assez forte. »

Pour Piers Faccini, l’idée de mouvement est primaire dans la vie d’un artiste. « Parce qu’un artiste qui est pas en mouvement, il est mort. Parce que forcément, il est devant la même chose jour après jour. Il peut le décrire plusieurs fois, mais le premier jet est la meilleure, toujours. Donc le mouvement c’est absolument essentiel. » Mais pas besoin de voyager pour être en mouvement. « L’idée du voyage pour moi c’est tous les jours, même si on est stable. L’idée du voyage est une vraie notion de nomadisme, c’est l’idée que rien n’est fixe : rien n’est acquis, rien n’est jamais pareil. Et je pense que cette notion de voyage dans ce contexte-là, c’est plutôt un voyage intérieur, en toi-même. »

Réclame

My Wilderness, le quatrième album de Piers Faccini est disponible chez Tôt Ou Tard.
Piers Faccini sera en concert le 25 octobre au Café de la Danse


Remerciements : Cécile DiSalvo (Wagram)

Catégorie : A la une, Entretiens
Artiste(s) :
Production(s) : ,

5 réactions »

Et toi t'en penses quoi ?