Entretien avec The Lemon Twigs

En un an seulement, The Lemon Twigs sont passés de la découverte à voir absolument à la sensation de festival. A l’été 2016, ils débarquaient de nulle part avec un clip fantasque, ‘These Words’, quelques mois plus tard sortait leur premier album officiel, Do Hollywood, et en mars 2017 les frangins D’Addario étaient obligés de déplacer à l’Elysée Monmartre leur concert prévu initialement à la Gaité Lyrique. C’est donc à Rock en Seine que Le Transistor a rencontré les petits prodiges, Brian, 20 ans et demie et son petit frère Michael, 19 ans.

The Lemon Twigs

Encore bien jet-laggés, The Lemon Twigs sont d’humeur philosophique.
Michael : Que devient l’âme quand on meurt ? J’aime bien l’idée que mon âme continue sa route.
Brian : Peut-être que l’âme porte des connaissances. Et que grâce à ça, certains n’ont pas besoin de recommencer à zéro.”

Justement, il se trouve qu’ils sont considérés comme des prodiges de la musique.
Michael : Je pense pas que la musique soit innée. Dans notre cas, c’est plutôt que nos parents jouaient de la musique.
Brian : C’est pas ce que pensent nos parents. Personnellement, je n’ai pas eu l’occasion de suivre l’évolution d’un enfant, donc je n’ai pas d’opinion. Parce que mon expérience personnelle est tellement spécifique. Il y a eu tellement d’heureux hasards, qui ont fait qu’on s’est lancé dans une carrière d’acteur… Et sans ça, on n’aurait jamais pu apprendre autant de choses au niveau scénique et musical.”

Pour leur premier concert, ils ont joué devant 15 000 personnes, en première partie de Foxygen.
Brian : Ah oui c’était au Webster Hall, mais c’était juste parce qu’on connaissait Foxygen. Jonathan a accepté qu’on ouvre le concert pour eux alors qu’ils nous avaient jamais réellement vu jouer. On s’était vus une fois, pour un déjeuner. En plus on avait aucune idée de la scène musicale new-yorkaise à l’époque.
Michael : C’était le seul groupe un peu hip qu’on connaissait… Sinon on avait entendu parler de MGMT, Tame Impala et The Flaming Lips, c’est tout.
Brian : C’était les seuls groupes modernes qu’on aimait. Donc c’était naturel pour nous de jouer au début dans le même registre.
Michael : Cela dit, on a eu le sentiment qu’il fallait les replacer dans un contexte plus moderne.
Brian : Mais on en est revenus de cette idée ! On veut pas faire de compromis. Pourquoi faire quelque chose uniquement parce qu’il faut que ça sonne moderne ? C’est ridicule. La plupart des gens, même les plus modernes, quand ils jouent leur chanson préférée, de tous les temps, souvent ils choisissent d’anciennes chansons, parce que c’est des classiques, tout simplement.”

The Lemon Twigs ne sont pas forcément d’accord avec leur étiquette “revival”.
Michael : C’est vrai qu’au début on a besoin d’une catégorisation, ne serait-ce que pour situer. Et nous, dans un sens, c’était voulu que de jouer la carte du psychédélique.
Brian : Ensuite nos concerts sont devenus beaucoup plus rock, donc quand on nous présentait encore comme un groupe psychédélique, on leur proposait de passer nous voir en live !
Michael : Même si bien entendu, l’un n’empêche pas l’autre, mais 13th Floor Elevators c’est du rock !
Brian : Mais au final, on a pas tant cet aspect psychédélique : sur l’album il y a peut-être deux moments – deux moments seulement !” (rires)

Et à cause de leur look, souvent pailleté, les frangins se retrouvent qualifiés de glam.
Brian : Pourtant on a pas le son de cette période. La musique glam se rapporte à un son très spécifique : environ trois ou quatre ans dans les années 70. Genre T-Rex, David Bowie, et un album de Lou Reed. C’est comme parler des groupes de hair metal et dire qu’ils sont glam ! Ca n’a aucun sens !
Michael : Certains disent aussi que Iggy Pop a été glam à un certain moment. Tout ça parce qu’il portait du maquillage ? Parce que ses albums… n’ont rien de glam !
Brian : En même temps, je m’en fous si les gens qualifient notre look de glam.
Michael : En vrai, notre look change tous les deux mois ! Ca devrait pas être aussi important, mais si on suit les shooting photos, on voit clairement qu’il y a des périodes où on ne porte rien de spécial. Rien de girly.”

The Lemon Twigs vient de sortir un EP, Brothers of Destruction, pour clore le chapitre Do Hollywood.
Brian : On a développé une nouvelle idée quand Michael allait en cours pendant 9h par jour. En fait, il a dû finir l’école une année plus tôt pour pouvoir tourner.
Michael : Je faisais la journée d’école, plus les cours du soir.
Brian : Il pensait à l’école sans arrêt, normal ! Donc il a écrit sur le sujet. Et pendant ce temps-là, j’étais moi aussi en train d’écrire des chansons, mais plutôt post-apocalyptiques : ça se passe dans un futur où les gens sont une version exagérée d’eux mêmes. Or le lycée c’est un peu ça en fait.
Michael : C’était la pire période pour moi, surtout au collège en fait. C’était la pire version de moi-même.
Brian : Mais je crois que c’est le cas pour tout le monde en fait.
Michael : C’est le moment où t’essaies de rentrer dans le moule, et donc t’es plus méchant que ce que tu devrais être, à tel point que c’en devient inconfortable. Et puis tu te sens réellement blessé quand les gens t’insultent…
Brian : Donc l’album parle de cette période, mais raconté par un singe très très très gentil. Il avait très envie d’aller à l’école, parce qu’il avait envie de créer une connection avec les autres humains, et il réalise qu’ils sont méchants.
Michael : Il réalise que les autres élèves, quand ils sont mauvais, ils s’en sortent mieux à l’école, pas au niveau des notes, mais ils sont mieux acceptés socialement.
Brian : En quelque sorte, il représente ce dont l’humanité manque le plus cruellement.”

Mais ils n’ont pas l’intention de s’arrêter en si bon chemin !
Brian : A côté de ce projet, à chaque fois qu’on a une chanson qui parle de nos vies, on la met sur une autre pile. Et on veut finir les deux albums avant d’entamer la prochaine tournée. On va se donner quatre ou cinq mois de pause, pour travailler. Ensuite on a décidé de les produire nous-mêmes. On a déjà appris beaucoup, donc on va l’appliquer.
Michael : On va faire l’album le plus personnel dans un vrai studio, pour le finir très rapidement.
Brian : Alors que l’album concept, on va l’enregistrer entre les tournées, à la maison.
Michael : On veut adopter une approche différente, au niveau de l’enregistrement.
Brian : Et puis c’est vrai que ça équilibre de faire l’album personnel dans un studio.
Michael : Par la suite, on a aussi envie de produire des albums pour d’autres artistes. Si on peut faire deux albums, d’affilée en plus, et qu’on arrive à les faire sonner… Ça nous fera une petite crédibilité.”


Remerciements : Sébastien [Beggars] et Marion [Ephélide]

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