Entretien avec Chvrches

Nouvelle sensation electro-pop de l’année, tout commence à se précipiter pour Chvrches (à prononcer comme églises en anglais). Propulsé par la BBC, ce jeune trio écossais a sorti son premier EP, Recover, au printemps dernier et s’apprêtent déjà à sortir leur premier album à l’automne : The Bones of What You Believe. Le Transistor a profité des Eurockéennes pour rencontrer Lauren Mayberry, Ian Cook et Martin Doherty et parler sport, religion et Kanye West.

Chvrches

A peine le dictaphone enclenché, le groupe demande à l’unisson si quelqu’un a eu les scores de Wimbledon ! « C’est pas qu’on suive réellement le tennis. On s’intéresse essentiellement aux sports pour lesquels les Ecossais sont bons, parce que ça n’arrive pas si souvent que ça… voire jamais en vrai ! »

Entretien avec Chvrches

Entretien avec Chvrches

Tout a commencé quand un certain groupe de folk, Blue Sky Archive, a voulu sortir un disque.
Lauren : En fait, c’est Ian a produit notre EP, c’est comme ça qu’on s’est rencontrés. Et il m’avait raconté qu’avec Martin -que je ne connaissais pas à cette époque-, il s’était lancé dans un projet. Je savais juste qu’ils se connaissaient depuis la fac et que Ian avait joué dans Aereogramme. Ensemble, ils voulaient monter un groupe pour lequel ils composeraient tous les deux au lieu de juste jouer.
Ian : Le plan à la base c’était que Martin assure le chant. Mais naturellement, j’ai proposé à Lauren de faire un essai pour des chœurs, et rapidement on s’est rendu compte que l’alchimie de sa voix avec la musique marchait, que la dynamique fonctionnait.
Martin : Une fois qu’on a trouvé le son qui nous convenait, on a pu partir sur la production. Lauren avait cette voix très douce donc on a donné une tournure plus agressive au son, juste pour équilibrer le tout. »

La condition pour que Lauren rejoigne le groupe, c’est qu’ils composent tous les trois ensemble.
Lauren : J’étais en phase de transition. J’avais envie de quelque chose de nouveau mais je voulais pas interpréter des chansons que d’autres avaient écrites. Déjà parce que j’ai toujours écris dans tous mes groupes, et ensuite parce que si tu veux le faire bien, monter un groupe ça prend beaucoup de temps. Et je vais pas m’investir si ça n’est pas important à mes yeux.
Martin : On vient de différents styles musicaux, ce qui fait qu’on a des influences très variées. Mais je pense qu’on a beaucoup appris de ces expériences.
Lauren : Il y a beaucoup de talents musicaux au sein de ce groupe, ce qui aide beaucoup. On joue tous de différents instruments, ça nous permet de tenter plein de choses. Et de créer notre son.
Martin : Le son du groupe vient aussi du fait qu’au début on voulait pas forcément composer sur les guitares. Et Ian, qui avait acheté pas mal de synthés vintage, s’est mis à jouer avec. C’est de là que c’est parti je pense. »

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Afin d’assurer le bon fonctionnement du groupe, Chvrches a instauré un processus démocratique. « On peut poser un véto uniquement si on est réellement pas d’accord, et les autres doivent respecter ce veto, à condition que l’autre n’en abuse pas.
Ian : Personne dans ce groupe ne prend de décision basé sur son ego ou dans son intérêt seulement. On prend les décisions créatives ensemble, et il faut une raison solide pour s’opposer à une proposition. Si c’est le cas, on en discute.
Lauren : Il faut s‘assurer qu’on est heureux de faire ce qu’on fait. Il y aura beaucoup de boulot, et si au bout du compte, si c’est une expérience horrible, c’est pas la peine. C’est pas comme dans un couple, où on part le matin au boulot et on se voit pas avant le soir. Dans un groupe, on fait tout ensemble, donc il faut s’assurer du bien-être de chacun. Il faut rester aussi ouvert que possible, et apprendre à partager plus que tu n’aimerais.
Martin : En plus, notre système encourage les discussions.
Lauren : C’est la clé ! C’est quand les gens ne s’expliquent pas que les problèmes surviennent. Je préfère avoir une conversation franche et inconfortable pendant cinq minutes – comme ça les autres savent ce que tu penses et pourquoi – au lieu de laisser le problème trainer pendant des mois. Parce que sinon, d’un coup ça surgit après quelques bières : ‘t’es qu’un connard !’. Simplement parce que ça se nourrit petit à petit… »

Chvrches semble avoir tout prévu pour se prémunir de la pression. « C’est un groupe qui est né sur Internet, et on serait rien sans toutes ces personnes qui ont choisi de faire passer notre musique à leurs amis. Donc, même si on est conscient de tout ce qui est en train de nous arriver, on sait qu’il faut garder le contrôle. C’est pour ça qu’on a voulu se concentrer sur nos tâches en tant que groupe, c’est-à-dire jouer nos chansons, faire des concerts…
Martin : La pression, ça peut tout ruiner. Imagine tu réalises que tous les yeux sont braqués sur toi… sauf que le processus créatif c’est quelque chose de naturel et surtout fragile !
Lauren : Si tu écris en réponse ou en réaction à ce que les gens pensent de ton groupe, c’est là que tu te fous en l’air. Parce que ça vient pas de là où c’est censé venir. C’est pas qu’on le ferait d’une manière cynique, mais peu importe la raison pour laquelle tu le fais, ce ne serait plus un processus organique. C’est pour ça qu’on essaie au maximum de se préserver. Comme si ça on se retrouve face à des critiques ou des approbations, tu sais que c’était ce que tu voulais faire de toute façon.
Martin : Tu es en mesure de le défendre ! »

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Pour finir, le groupe accepte d’expliquer l’orthographe alambiquée de leur nom. « Quand on a mis la première vidéo en ligne, on arrivait pas à la trouver. Alors on a testé, et quand on cherchait ‘churches’, ‘music’, ‘band’, ‘Glasgow’, rien ne ressortait. Juste des mauvais groupes qui ont joué dans les églises de la ville ! C’est pour ça qu’on a voulu styliser le logo. C’était pas un plan marketing machiavélique, mais je pense que ça a aidé les gens à nous retrouver sur Internet.
Ian : c’est pour ça qu’on a remplacé le U par le chiffre romain V. Mais c’est marrant le nombre de personne qui s’interrogent sur la prononciation !
Lauren : Une personne m’a interpellée dans la rue en disant : ‘oh ! tu joues dans chervaise !’ pardon ?
Martin : De toute façon, on avait pas envie d’entrer en compétition avec Dieu, faut avouer qu’il est assez présent sur Internet.
Ian : En fin de compte, quand John Lennon a dit que les Beatles étaient plus importants que Dieu, c’était pas une si bonne tactique de relations publiques.
Lauren : C’est Kanye West qui nous fait ça en ce moment en disant qu’il est un dieu, et qu’il est mieux que Jesus et Steve Jobs…
Ian : et il a appelé son album Yeezuz !!
Lauren : au moins il a des couilles ! Il a un truc et il s’y tient ! »

Réclame

The Bones of What You Believe, le premier album de Chvrches est à paraître le 23 septembre chez Universal.
Chvrches est en concert à Rock en Seine !


Remerciements : Marion (Ephélide) et Anaïs

Catégorie : A la une, Entretiens
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3 réactions »

  • Rock en Seine 2013 - Jour 3 - Le Transistor | Le Transistor :

    […] Ravie de pouvoir exercer son peu de français, l’enthousiaste Lauren se met à échanger volubilement avec le public. Mais les deux musiciens ne l’entendent pas de cette oreille et lui coupent la parole avec les machines. Néanmoins, lorsque Ian, qui devait initialement devenir le chanteur, reprend le micro pour une chanson, on comprend pourquoi Martin s’est tourné vers Lauren, qui a moins de présence mais plus de charmes. Parce qu’au final, leur single est gentil et dansant mais c’est pas le groupe de l’année non plus. Lire l’interview de Chvrches […]

  • Pitchfork Music festival 2014 : deuxième jour - Le Transistor | Le Transistor :

    […] Après le chant à la fois strident et guimauve de Chvrches, Le Transistor n’est pas mécontent de retrouver la pop sixties de Belle & Sebastian. Les quinze musiciens (presque sans exagération) ouvrent le set avec ‘You’re Just a Baby’, qui sent un peu la naphtaline – après tout, ce morceau remonte à Tigermilk, paru en 1996. Heureusement, le groupe enchaîne avec sa pop à rebondissements sur ‘Funny Little Frog’ qui respire l’admiration pour Brian Wilson. De là, le groupe s’amuse en freestyle sur le solo blues de ‘Sukie in the Graveyard’, et laisse échapper de jolies dissonances sur ‘The Fox in the Snow’, mais ne s’impose pas : le public est plus préoccupé par la file d’attente dans le métro pour le pass navigo de novembre que par leur performance. Pourtant, leur concert respire l’insouciance avec ‘I Didn’t See It Coming’, et la foule se met même à danser légèrement sur ‘The Party Line’. Alors pour motiver les troupes, Stuart Murdoch descend dans la fosse, et fait monter les gens déguisés pour ‘Sleep The Clock Around’. Après une belle séance de câlins, Belle & Sebastian revient même pour un rappel, mais ce ne sera malheureusement pas pour jouer ‘I Want The World To Stop’… Lire le live report de Belle and Sebastian au Grand Rex […]

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