Entretien avec Tahiti Boy & The Palmtree Family

Après plusieurs années d’inquiétudes, Tahiti Boy and the Palmtree Family est revenue armée de Fireman. Pour l’instant, on a qu’un EP à se mettre sous la dent, mais on est désormais rassurés : c’est pour annoncer un album à paraître d’ici quelques mois. On s’est donc posé avec un grand nom de la pop française, David Sztanke alias Tahiti Boy, pour discuter de sa famille palmier et d’autres projets dans lesquels il est toujours fourré.

Tahiti Boy & The Palmtree Family

Ca faisait quatre ans qu’on n’avait pas entendu parler de Tahiti Boy and the Palmtree Family. « J’ai pas rien fait, j’ai enregistré un album. (rires) Après j’ai peut-être mis deux ans pour le faire aussi parce que j’avais besoin de deux ans pour l’écrire. »

Tahiti Boy © Marcelo Gomes

L’enregistrement de ce nouvel album s’est donc étalé sur deux ans. « Dans l’idée de rester indépendants, au lieu d’aller passer trois semaines dans un gros studio, et de devoir plein de thunes à une maison de disque qui va coûter super cher pour l’ingé son, bah on a fait ça entre nous, et en gros dès que je faisais une maquette, on l’enregistrait. » Donc pour la première fois, Tahiti Boy a fait des maquettes pour ses morceaux. « Ce que je cherchais c’était des sons, mais les structures je les ai pas développées tout seul. En gros pendant deux ans, le rythme c’était dès que j’avais trois maquettes dignes d’être entendues, je prenais trois jours de studio, et le groupe enregistrait. Au lieu de prendre un mois d’un coup pour enregistrer toutes les maquettes, on l’a juste découpé sur deux ans. »

Ce choix des maquettes vient d’une remise en question. « J’adore le piano, j’en fais tout le temps, c’est pour ça qu’on me connaît, etc. Mais juste, j’écris toujours la même chose dessus. Quand je me mets devant un piano – alors c’est pas pareil quand j’écris pour d’autres -, mais moi, je sais ce que j’aime et ce que j’aime pas, et y’a 99% de chances pour que après un do mineur, je fasse le même accord que ce que j’ai déjà fait quatre fois… » Pour pouvoir se surprendre lui-même, il a remis le piano en question. « Le problème c’est probablement pas moi, parce que j’ai encore plein de trucs à écrire, mais je pense que le problème c’est le médium par lequel je le compose. Alors évidemment, j’en joue encore et j’adore ça, sauf que pour l’écriture, pas pour le jouer sur scène, je l’ai pas fait au piano du tout. Et donc c’est là que c’était intéressant pour moi de faire des maquettes. »

Du coup, le groupe n’a pas adopté la même méthode de travail. « Avant j’écrivais les morceaux, puis j’arrivais en répète et on essayait ensemble. Et si mon idée marchait, on la gardait mais si l’idée du batteur marchait mieux, cetait la sienne qu’on gardait. J’amenais les chansons, mais on mettait le morceau en avant. Et là, j’ai fait des maquettes sur l’ordinateur, avec des machines, avec des samples, en faisant n’importe quoi en fait ! » Avec les maquettes, Tahiti Boy a approfondi ses recherches. « C’etait un bordel organisé avec un lot de trucs qui marchent grave et d’autres pas du tout que j’ai jeté à la poubelle en rouvrant mon fichier le lendemain ! Mais pas mal, hein : plus de 50% des trucs que j’ai fait depuis deux ans pour le groupe, je les ai même pas présentés aux musiciens. En revanche, les trucs qui d’après moi méritaient d’être tentés, c’est aussi des trucs qui sont nés comme ça. Et c’est pour ça que notre son a changé. »

Avec la sortie de l’EP, la Palmtree Family s’est reformée… sauf qu’elle ne s’est jamais mise en pause. « Je fais énormément de production, et aussi sur les musiques de film que j’ai faites, si tu regardes bien les noms des musiciens, y’a pas écrit Palmtree Family mais c’est toujours le groupe : sur l’album de Loane c’est le groupe, là je finis Micky Green c’est eux, sur Wrong, la BO avec Quentin Dupieux [alias Mr Oizo] pareil. Et les Lilies bien évidemment. » Les musiciens sont pourtant tous bien pris par des projets parallèles. « Samy et Didier à la basse sont avec Rover, Jean le batteur est avec François & the Atlas Mountain, Vincent qui fait des percussions classiques et de la flute et tout ça, il était dans un périple en Asie. Thomas, le violoncelliste, toujours là, il bosse à côté et il fait plein de performances, et Antoine c’est Jamaica. » On note au passage que Jonathan de Syd Matters a été remplacé par Samy Osta (Domingo, Da Brasilians, La Femme, Mrs Good), mais la Palmtree Family est un réel groupe. « Nos plannings se goupillent, mais c’est parce qu’avant tout on est des potes et pas des mecs mandatés pour jouer l’album… c’est pas des requins de studio. »

Dans tous les projets pour lesquels David Sztanke travaille, la Palmtree Family est présente. « Ils sont partout, dans tout ce que je fais, sauf que comme… je les fais interagir dans des projets dans lesquels moi-même je suis pas le leader donc ni tu m’entends parler, ni tu te rends compte que c’est eux. Mais si tu fais le lien, si on avait une page Wikipedia y’aurait des liens hypertextes partout. » Le Transistor propose donc l’appellation de SuperGroupe. « Ca me fait plutôt marrer, cet espèce de truc encyclopédique des gens qui écoutent de la musique. Mais le truc du collectif, ça veut dire tout le monde est interchangeable, or c’est faux. Antoine il est dans le groupe parce que c’est mon super pote, et parce que ses lignes de guitare elles tuent, parce que c’est ses lignes à lui. Et ça veut pas dire que celles des autres sont pas meilleures, ou aussi bien, juste moi ce que je veux dans le groupe c’est lui. »
On retiendra la formulation de Tahiti Boy, parce que c’est le chef après tout: « Je préfère Dream Team que SuperGroupe en fait. Chaque place de chacun de ces mecs-là est justifiée par leur savoir-faire, leur intelligence, leur lecture de la musique, leurs influences. »

Malgré son amour du hip-hop, Tahiti Boy revient toujours à la pop. « J’en ai fait toute ma vie, c’est comme ça que j’ai commencé à gagner un petit peu d’argent : en accompagnant des rappeurs sur scène. D’ailleurs je produis le prochain album de Mike Ladd [qui a co-écrit les paroles de ‘The Park‘], et j’étais encore en tournée avec Saul Williams l’année dernière. Mais déjà je pense pas pouvoir rapper bien… Je dis ça, j’ai jamais essayé, si ça se trouve jef vais être juste chan-mé, on verra si je suis le prochain Method Man, qui sait. J’ai cette chance de pouvoir faire à peu près ce que je veux, donc si demain je veux faire un album de rap… »
Mais au final, même quand Tahiti Boy fait du rap, il fait de la pop. « Si t’écoutes ce que je fais au clavier sur scène avec Antipop Consortium ou autres, tu vas entendre des arrangements… je me trahis jamais. Quand je suis sur scène avec Saul Williams, je vais faire des accords un peu enrichis, et pourtant c’est une musique limite punk. Sauf que si tu sépares mon set, tu isoles ce que je fais, tu vas entendre mes trucs. Donc en fait, je suis jamais quelqu’un d’autre que ce mec qui fait de la pop. Même si des fois je l’applique… Comme avec Oxmo Puccino. »

Réclame

L’EP Fireman de Tahiti Boy & the Palmtree Family est disponible le 5 novembre chez Edge Of Town records.
Comme l’EP est somptueux, on attend les dates de concert avec impatience.


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