Beaffle #5 : Vadel

Pas plus tard que y’a pas longtemps, alors que j’étais en train de buller négligemment aux frais de je ne sais plus quel attaché de presse, voila pas que le passe plat professionnel me regarde et me dit : “Eh mec, toi qui aimes le rock il faudrait que t’écoutes Vadel, ça devrait te plaire”.
Je crois que si je n’avais pas payé mon repas avec mes deniers durement gagnés à la sueur de mes âneries je lui aurais vomis mon steak frites sur les pompes.

Bon j’avoue, j’ai un peu de mal à dire du mal de Vadel. Pas parce que j’aime bien hein, j’ai des oreilles qui fonctionnent un minimum et je sais faire la différence entre un vagissement dominical et agissement vaguement musical. Non, juste parce que c’est finalement rassurant de voir que t’as beau avoir les dents aussi longues que le bras de ton papa, et inversement proportionnel à ton talent, quand tu fais de la musique de merchanding, eh bah ça marche pas forcément.

Vadel-Joe-Cocker[1]

Ouais, parceque Vadel est un bon gros fils de prothésiste dentaire. Si t’en as jamais entendu parler c’est bien pour toi. Si tu sais de quoi je parle, c’est que l’argent dentaire amputé du portefeuille de son papa qui a acheté les premières parties de Depeche Mode, Joe Cocker ou Tokyo Hotel en vendant les siennes a été utile. Passé par la case Polydor à la force du flouze paternel et à celle de son poignet de bran… de MEC branché, pardon, Vadel a finalement atterri chez Play On. Le label qui a commis Zaz et Colonel Reyel notamment. Une jolie connivence.

Je me rappelle avoir croisé cet androgyne sur la scène du Bus Paladium. Complètement concentré sur sa musique, le voila pas qu’il débite pieusement après quelques bêlement personnels, des reprises bien peu respectueuses des Beatles avec sa voix nasillarde.

Au début j’avais l’impression d’être à un spectacle de stand up : un mec debout devant des gens que tu comprends pas pourquoi les gens sont là et qui te fait vaguement marrer. Pis Vadel joue un peu de la guitare de Jamel Debouzze. Mais non en fait le mec est totalement sérieux. Derrière son maquillage et sa dégaine au charisme à mi chemin entre le marshmallow et le poisson rouge, Adam Vadel lâche tout. Il se tortille sur scène comme si sa musique lui donnait envie de déféquer.

Après 10 minutes qu’on sert son cancer, je me suis dit que c’est vraiment une sale opération que d’être venu ce soir. Et que sa musique est à Chimay ce que la bière est à Rika Zaraï.
Ennuyeux comme un jour de pluie à Blackburn, le rockeur de supermarché enchaîne les titres tellement référencés qu’on se croirait à un concours de fin de série de sosies à la fête des Chantereines de Saint-Etienne-Le-Vieux. Ou dans une salle de reprographie chinoise.

Au fond de la salle, branlant du chef, son père opine, fier de son condescendant descendant et de ses parodies musicales. Au milieu un public concupiscent qui subit le volume sonore du Sébastien Patrick du rock, sans avoir payé l’entrée. C’est papa qui a régalé. Comme pour ses albums, ses clips et ses concerts en fait.

Au bout d’une heure, le ténébreux Vadel sort de scène sous les ovations de la dizaine d’amis payés pour l’occasion. Il se prend en photo avec son public de fan-potes à la compte, dent de requin autour du cou (hommage à l’origine du pognon paternel j’imagine), et discute, faussement intéressé et sympathique. Son vrai génie reste dans cette capacité à créer une vraie-fausse distance entre lui et les quelques clampins perdus dans une salle désespérément vide.

Alors vous allez me dire, “qu’est ce que ça peut te faire à toi Benjamin Lemaire que cette ordinaire garçon fasse ça”. Eh bah je vais te le dire, même si personne me pose la question (ouais je fais comme Vadel, je me pose moi même mes questions comme ça, je suis pas ennuyé). Nonobstant le fait que j’aime pas les parents qui jouent avec leurs enfants salonards comme si c’était des Sims, j’enfoire les papas Vadel, qui rêvent que leurs fistons fassent ce que ils auraient aimé être. Tu sais papa Vadel. Il fallait juste en pondre un avec du talent.

Ensuite, ça me gêne qu’on force un système qui ne va déjà pas très bien, en défonçant les portes des tourneurs et des labels à coup de billets. C’est pas illégal. C’est pas malhonnête. C’est juste immoral et inutile. La preuve, même avec une diffusion massive sur des radios jeunes de son titre, disons le, pas très très cool, Drama Queen, eh bah Vadel a rien vendu dans les bacs et se contente de poser sur sa page Facebook avec Johnny Hallyday. C’est dire la détresse artistique.

Allez quoi Vadel, abandonne. Utilise ton blé pour en faire pousser en Afrique. Ou paye toi des cours de guitares, réincarne toi en Jimi Hendrix en rachetant ses membres. Et je ne parle pas du moulage de Cynthia Caster, je n’attaque pas le physique. D’ailleurs c’est un des trucs sur lesquels on peut pas attaquer le fils Vadel. Il n’a pas de talent mais il a de belles dents. Et ça nous fait une belle jambe.




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