Entretien avec Erik Truffaz

Le 29 octobre dernier, Erik Truffaz sortait un nouvel album : El Tiempo De La Revolution mélange les univers du quartet, entre les envies de voyage et la révolte latente, le tout saupoudré du charme paisible d’Anna Aaron. Le Transistor est parti rencontrer le fameux trompettiste et son pétillant bassiste Marcello Guiliani pour discuter de techniques et d’inspirations.

Erik Truffaz

C’est un peu impressionnant de rencontrer Erik Truffaz, aussi on cherche les mots d’introduction. Mais c’est sans compter sur le taquin Marcello qui avant qu’on ait pu ouvrir la bouche lance un : « Non pas cette question, la suivante. »

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El Tiempo De La Revolution est considéré comme la suite de In Between.
Marcello Guiliani : Il y a eu un changement dans le groupe, au clavier c’était Patrick Muller avant et depuis In Between c’est Benoît Corboz. Et quand tu changes quelqu’un, il amène sa manière d’être, sa manière de jouer. Et puis on l’a un peu poussé : Patrick était bien concentré Rhodes Fender, et y’en a toujours, mais on a demandé à Benoît s’il pouvait aller vers de l’Orgue Hammond, ce qu’il a fait avec plaisir et je trouve avec réussite. Et donc ça a amené un son nouveau. Effectivement, c’est pas un concept, mais c’était un peu une suite logique dans ce sens-là.
Erik Truffaz : In Between c’est la naissance d’un nouveau groupe et El Tiempo c’est la conséquence de trois ans… C’est aussi la suite parce que quand on l’écoute, on voit qu’il y a des liens. C’est assez clair.

Sur In Between, c’était Sophie Hunger qui prêtait sa voix ; El Tiempo De La Revolution invite Anna Aaron au chant.
Erik : Marcello connaît Anna plus intimement puisqu’il a produit son album.
Marcello : Plus intimement ? Mon dieu ! J’ai travaillé avec elle. Donc on est devenus amis, ça s’est fait naturellement. On aime surtout comment elle chante. On aime sa voix, et puis c’est une fille avec qui c’est facile : tu peux travailler, lui envoyer un truc, elle arrive elle a fait sa mélodie. On va pas passer deux semaines en studio pour essayer de faire une chanson. Que ce soit Sophie Hunger, Anna Aaron ou notre Christophe national, ça s’est toujours passé comme ça. Et bien entendu ils amènent avec eux un monde, leur monde, ils ont une personnalité.

Le titre phare ‘El Tiempo De La Revolution‘ a des accents morriconiens…
Erik : ‘El Tiempo De La Revolution‘ c’est un morceau qui est un peu construit comme un hymne, qui va crescendo avec des harmonies qui se répètent. C’était un peu une dédicace à Ennio Morricone… On pensait l’appeler Le Temps de la Revolution mais je trouvais ça un peu trop cru, et puis on était en Espagne donc j’ai pensé le traduire.
Marcello : C’est un titre qui est pas anodin, c’est un peu ce qu’on a vécu pendant ces cinq dernières années…

Marcello raconte comment le morceau est né. « Pour ce morceau, Erik a amené une ballade, on l’a enregistrée et c’est celle qui est à la fin de l’album. Et moi avec ma sale gueule habituelle, je fais bon les gars, c’est très joli mais je pense que ces accords là on peut peut-être essayer d’en faire autre chose ou je sais plus comment… mais tu sais dans le studio des fois c’est tendu, on cherche pendant deux heures on trouve rien, on se demande ce qu’on va faire, c’est horrible. » C’est lui qui a cherché à développer la ballade. « Et j’entends une rythmique, on part là-dessus et on fait monter monter monter… Et effectivement Morricone on est fan, donc ça nous dérange absolument pas : Il Etait Une Fois Dans L’Ouest, Il Etait Une Fois La Révolution… Et on était en plein Printemps Arabe, avec la Lybie… et c’est la crise. Sans aller chercher trop loin, ça correspondait bien aussi aux temps qu’on est en train de vivre… »

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Sur cet album, des titres comme ‘Istanbul Tango’ ou ‘African Mista’ semblent inviter au voyage comme sur les derniers albums d’Erik Truffaz.
Erik : Ah oui mais ça c’est autre chose. Paris Benares Mexico c’est des projets que j’ai fait avec d’autres musiciens. C’est projets très différents, Benares a été enregistré en Inde, ca n’a rien à voir. C’est avec un autre groupe. Effectivement, j’avais envie d’appeler cet album Istanbul Tango mais à juste titre, Marcello…
Marcello : …et tous les autres…
Erik : …ont fait remarquer qu’on avait tellement de noms de ville sur les albums, on va pas faire toutes les villes du monde non plus
Marcello : On voyage beaucoup, et puis ça nous touche les villes où on va, tu penses bien… Nous on fait de l’instrumental : quand tu as des paroles et que tu écris une chanson d’amour, c’est plus facile de trouver un titre ! Là, c’est Erik qui se gratte la tête : c’est sa mission de trouver les titres. Et comme on essaie quand même de trouver un titre où on est ensemble, même un petit peu, ou un truc qu’on connait tous… et ce qu’on vit ensemble, c’est les tournées.
Erik : Les titres restent anecdotiques mais doivent quand même être poétiques. On compose d’abord et ensuite on cherche les titres ensemble, et souvent on en a jamais assez, et après on les change… Mais c’est pas par rapport à l’endroit où on l’a composé, c’est juste que le titre doit quand même faire rêver, c’est important.

Malgré tout, les albums d’Erik Truffaz se dégustent toujours mieux lors d’un voyage.
Erik : ça fonctionne avec le paysage. Parce qu’il y a une relation à l’espace.
Marcello : C’est une thématique du groupe. T’imagines comment ça commence : on a tous des influences, il fait de la trompette, on a tous écouté Miles Davis comme des cons, et quand on se laisse aller… Ca se fait des fois même pas en parlant, des fois en repet, ouh là ! qu’est-ce que t’es en train de faire ? stop notons, c’est beau. Et gentiment tu vois qu’on arrive à des choses qui nous ressemblent.
Erik : On affine notre structure…
Marcello : ça prend du temps. Et effectivement ce qui nous rassemble c’est l’espace, les voyages. On est des doux rêveurs, c’est ce qui fait notre personnalité, ce groupe-là.

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La thématique du Erik Truffaz Quartet serait donc les grands espaces ?
Erik : Non, ce qu’on recherche c’est transmettre de l’émotion au travers de la musique. C’est pas très compliqué : y’a une partie rythmique, faut qu’il y ait des bons grooves, et une partie mélodique, faut de belles mélodies… Mais on essaie avant tout que le son soit pas trop américain, surtout la trompette. Que ce soit pas une copie du jazz. Tout d’abord parce que je sais pas faire, mais en plus c’est pas moi. Au moins, ce que nous apprend l’âge, c’est d’arriver de plus en plus à être soi-même.

Réclame
El Tiempo De La Revolution, le dernier album du Erik Truffaz Quartet, est paru sur le label Blue Note.
Erik Truffaz Quartet sera en concert les 14 et 15 décembre au Trianon. La tournée française reprendra le 13 mars pour finir sur l’Olympia le 6 avril 2013.


Remerciements : Marion (Ephelide)

Catégorie : A la une, Entretiens
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2 réactions »

  • Julien :

    J’ai hâte de l’écouter, j’adore Erik Truffaz.
    Bravo pour l’article et les photos+ vidéo

  • agnes (author) :

    merci de ton retour !! 😉

Et toi t'en penses quoi ?